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Notre-Dame de l'Hermitage, le secret de Marie

Site patrimonial d’exception, Notre-Dame de l’Hermitage trône dans un écrin de verdure ligérienne, offrant aux pèlerins et aux touristes un refuge salutaire loin du monde et du bruit.

© Marie-Ève Bourgois

C’est un lieu relativement peu connu en France, et pourtant, il n’est pas exagéré d’affirmer qu’il mérite le détour, aussi sinueux soit-il. Perché à 1 110 mètres d’altitude dans la Loire, non loin de la limite avec le Puy-de- Dôme, le sanctuaire Notre-Dame de l’Hermitage séduit par bien des aspects. En arrivant à destination après avoir serpenté sur une large route ombragée, l’environnement séduit d’abord, offrant à tous les pèlerins ou curieux de passage la paix nécessaire au recueillement, voire à la prière. Le sanctuaire situé presque à équidistance de Clermont-Ferrand et de Saint-Étienne se trouve à sept kilomètres du village le plus proche, Noirétable. Tout autour, il n’y a rien, sinon des pins par centaines, des chemins caillouteux, des prairies verdoyantes l’été et enneigées l’hiver. Un petit coin de paradis pour les amoureux de la nature. Le domaine est d’ailleurs traversé par les chemins de grande randonnée GR3 et GR89 et certains circuits offrent une vue superbe sur les volcans d’Auvergne.

En s’avançant, difficile de manquer le rocher de Pérotine, surmonté d’une grande croix blanche qui domine la vallée. À son pied, le pèlerin est chaleureusement accueilli par une belle statue de saint Joseph portant l’Enfant Jésus, qui précède une autre statue plus modeste, celle de saint Roch, placée dans une petite niche. Pour gravir le rocher et accéder à la vue spectaculaire, il faut emprunter l’escalier saint (scala santa), reproduction de celui de Rome, doté des mêmes indulgences et ponctué de quatorze plaques évoquant les quatorze stations du chemin de Croix. Cet escalier n’est pas sans rappeler celui que Jésus gravit avant de comparaître devant Pilate.

 

ENTRE LÉGENDE ET HISTOIRE

Si la beauté du lieu est à couper le souffle, elle n’a rien à envier à son histoire séculaire qui commence il y a bien longtemps, au XIIe siècle. À cette époque, la Vierge Marie est apparue près d’une source à un homme solitaire, sans doute un criminel en cavale, pour lui adresser ces mots : « Va te confesser au prieur de Noirétable et reviens ici faire pénitence. » Le prieuré avait été fondé un siècle plus tôt par l’abbaye de Cluny. L’homme obéit et devint le premier ermite de cet endroit isolé, transformé en peu de temps en un lieu de pèlerinage pour tous les amoureux de la sainte Mère de Dieu. Avant même cette apparition, la légende veut qu’un site druidique ait existé près de cette source entourée de rochers.

Pour accueillir les pèlerins, une première église est rapidement construite à proximité de la source, bientôt remplacée par une plus grande au XIVe siècle. Le pèlerinage de Noirétable est mentionné dans un acte officiel pour la première fois en 1381. Aujourd’hui encore, il est possible d’aller boire l’eau de la source dont la température reste invariable à 6,7 °C. Éclairée par l’inscription « mon âme a soif du Dieu vivant », elle se trouve maintenant à quelques mètres de la chapelle actuelle construite en 1876. La petite bâtisse rayonne en pleine nature, décorée par des dizaines d’ex-voto et de deux belles statues de la Vierge placées près de l’autel. Quelques bougies allumées témoignent du passage des pèlerins dans les heures passées. Marie, aussi retirée soit-elle, n’est jamais seule. Lors des fêtes mariales du 15 août et du 8 septembre, elle est même portée en procession devant une foule nombreuse venue lui rendre hommage.

Quelques dizaines de mètres plus haut, toujours en pleine nature, une autre petite chapelle érigée à la fin du XIXe siècle s’élève au fond d’un modeste cimetière. Elle est dédiée au père François Gaschon, prêtre missionnaire de la Mission Royale à la fin du XVIIIe siècle, dont le procès en béatification est en cours. À l’intérieur, une exposition permanente en libre accès permet de découvrir la vie de ce saint prêtre relatée sur de remarquables peintures qui décorent les murs de la chapelle. Le cimetière est créé bien plus tard, dans les années 1950 : c’est là que reposent de nombreux missionnaires fondateurs.

 

LES DIFFICILES DÉBUTS D’UN SANCTUAIRE

En 1669, un premier monastère sort péniblement de terre autour du rocher de Pérotine, à 500 mètres de la source, par les missionnaires royaux du diocèse de Clermont-Ferrand. Le lieu est choisi au XVIIe siècle pour devenir le noviciat, la maison de formation des missionnaires royaux. Mais la Révolution de 1789 oblige les missionnaires à quitter l’endroit et à se réfugier dans les fermes voisines. Bien que des pèlerins continuent de venir prier à la source, la grande église et les bâtiments du sanctuaire tombent lentement en ruines. Pendant près de cent ans, la vie s’arrête. Mais le 9 février 1889 est une date à marquer d’une croix blanche : ce jour marque la renaissance du lieu, lorsque des prêtres missionnaires de la toute nouvelle congrégation de La Salette s’y installent. Pendant plus de dix ans, ils s’évertuent à réparer, construire, agrandir. Mais en 1902, c’est l’inventaire, la liquidation des biens du sanctuaire et la fuite des prêtres victimes des lois sévères contre les congrégations. Ce n’est que partie remise… Les pères de La Salette reviennent en 1926 et agrandissent les bâtiments. L’électricité arrive sur place en 1935, puis le téléphone quatre ans plus tard. Mais le sort s’acharne sur Notre-Dame de l’Hermitage qui brûle en 1951. La reconstruction est possible grâce aux dons et aux efforts de toute une communauté guidée par la lumière de Dieu.

Depuis le 8 septembre 2001, les soeurs de La Salette ont repris le flambeau de ce lieu d’exception. Impossible ainsi de ne pas mentionner la maison d’accueil et l’hôtellerie gérées aujourd’hui par l’association Notre-Dame de l’Hermitage. Créée en 2001, elle rassemble les amis du sanctuaire et de très nombreux bénévoles qui viennent en aide aux religieuses malgaches et au père Christophe Tarnopolski qui vivent sur place. Tous les jours de l’année sauf en novembre, Julienne, Rosaline, Margo et leurs soeurs accueillent avec joie les individus, les groupes, les familles ou les couples en quête d’un séjour hors du temps pour se ressourcer. Les repas simples et peu coûteux sont délicieux, et la messe est célébrée chaque jour, parfois suivie par des touristes très éloignés de la foi. « Fidèle à la tradition, ce site fondé par un ermite pénitent est un lieu de miséricorde et de réconciliation avec Dieu, avec soi-même et avec les autres », peut-on lire sur le site Internet du sanctuaire. Après quelques jours passés sur place, une idée germe lentement dans le coeur : y revenir dès que possible.

Plus d’information : www.notredame-hermitage-noiretable.fr

Marie-Ève Bourgois

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