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Le Carême à l'école de sainte Hildegarde

Si ce temps privilégié a souvent été récupéré, édulcoré et réduit à une simple méthode de bien-être, Hildegarde de Bingen nous enseigne, au contraire, que ces quarante jours peuvent être une occasion unique de prendre soin de notre corps, mais aussi de notre âme et de notre esprit, car l’homme – créé par Dieu – est un tout. Voyons ainsi comment l’œuvre de la sainte est susceptible de nous aider à mieux vivre et comprendre la période de Carême à laquelle l’Église nous convie pour nous préparer spirituellement à la fête de Pâques.

Sainte Hildegarde / © Shutterstock

Le Carême, période de prière, de réflexion sur notre vie et de conversion, est aussi un temps de purification spirituelle et physique, de modération, voire d’abstinence et de jeûne.

 

POURQUOI ET COMMENT PURIFIER SON CORPS AVEC SAINTE HILDEGARDE ?

La purification du corps n’est pas abordée de façon systématique dans l’oeuvre de la sainte, mais on trouve, au fil de ses textes dits « médicaux », les notions de « diète », « jeûne », « nettoyage », « purification », « drainage » (plantes drainantes des organes, du sang), etc., afin de diminuer les humeurs mauvaises (ou toxines) qui s’accumulent inévitablement dans le corps.

La meilleure méthode pour se purifier reste bien sûr l’alimentation, grâce à des mets tels que l’épeautre, la châtaigne, le céleri, l’ail ou le panais. Elle doit être complétée par la « diète », que la moniale considère comme une alimentation légère et équilibrée. Hildegarde mentionne ainsi des privations (réservées aux personnes en bonne santé) et évoque la suppression du petit déjeuner ou du dîner.

Au Moyen Âge, qui n’était pourtant pas une période d’abondance et de trop-plein comme la nôtre, la moniale – guidée par Dieu et qui connaît l’âme humaine – note parmi les vices la gloutonnerie et, parmi les vertus, la sobriété et la frugalité (Livre des mérites de la vie). Le Carême a pour objet de nous faire grandir en vertu : par la sobriété et la frugalité, ce sont d’autres vertus que nous faisons croître. Mais attention, sainte Hildegarde nous invite, comme l’Évangile, à des jeûnes joyeux. Toujours attentive à l’équilibre, au juste milieu en toutes choses et par crainte que le jeûneur ne tombe dans l’orgueil, elle préconise également la modération dans… les privations ! Merveilleux équilibre de ses conseils !

« Résiste donc à la concupiscence de la chair et Dieu t’aidera. Car, lorsque tu t’opposes à Satan, comme un valeureux guerrier à son ennemi, alors Dieu se complaît dans ta résistance, et veut que tu l’invoques constamment, à toute heure, et dans toutes les embûches. Mais lorsque tu ne veux pas dompter ta chair, alors tu l’engraisses de vices et de péchés, et tu lui retires le frein de la crainte de Dieu, avec lequel tu devrais la retenir, pour qu’elle ne tombât pas dans la perdition. » (Scivias)

 

POURQUOI ET COMMENT PURIFIER SON ÂME AVEC SAINTE HILDEGARDE ?

La moniale ne sépare pas le corps, l’âme et l’esprit qui forment une unique réalité, de différents niveaux, de l’être. L’homme, « clôture des merveilles de Dieu », est un tout constitué d’une dimension matérielle unie à sa dimension spirituelle : il n’est réductible à aucune de ses trois dimensions.

Si le corps est à purifier, l’âme, de la même façon, doit l’être également. Aussi, Hildegarde insiste sur les effets de nos choix pour nourrir notre corps sur la vie de l’âme. Elle rappelle ainsi que des nourritures excessives ou de mauvaise qualité alourdissent l’esprit et empêchent même l’homme de prier. Dans ses nombreuses visions et leurs commentaires, véritable catéchisme, la sainte rappelle également que la purification de l’âme doit se faire au moyen des sacrements, comme la pénitence ou l’Eucharistie.

Concluons ici en soulignant que l’oeuvre médicale et mystique de sainte Hildegarde a bien la même vocation que le Carême : celle de conduire le fidèle vers le salut.

Évelyne Duplessix

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