Les chrétiens soudanais sont particulièrement menacés

Credit: UN Photo/JC McIlwaine via Flickr

Le 26 novembre, à Port Soudan, sur la côte de la mer Rouge, la communauté de chrétiens  presbytériens a été très perturbée de découvrir ce slogan inscrit à l’encre rouge sur les murs de son temple : « Il n’y a pas d’autre Dieu qu’Allah et Mohammed est son prophète ». Une vidéo montrant l’homme écrire cette formule en arabe sur le lieu de culte chrétien a été diffusée sur les réseaux sociaux. Philip Abdelmasih, l’un des membres de la communauté visée, l’Église presbytérienne évangélique soudanaise, avertit : « Cette action délibérée des islamistes pourrait marquer les prémices d’agissements d’un Boko-Haram soudanais ».

La guerre civile qui déchire le Soudan depuis avril 2023, donne lieu à d’innombrables crimes de guerre commis par les deux camps qui s’affrontent, l’armée gouvernementale et les Forces de soutien rapide (FSR). Un exemple récent de massacres, parmi des centaines d’autres, l'assaut de djihadistes des FSR contre la ville d’El-Facher, capitale du Darfour-Nord, tombée le 26 octobre aux mains de ces paramilitaires : « Les combattants des FSR ont exécuté un très grand nombre d’hommes non armés et violé des dizaines de femmes et de filles lorsqu’ils se sont emparés de la ville » rapporte Amnesty International. Cet affrontement sans merci entre deux belligérants islamistes aurait entraîné la mort d’au moins 150.000 personnes, en aurait déplacé près de 13 millions dont la moitié sont des enfants, et laissé 18 millions au bord de la famine.

Dans ce contexte, les chrétiens du Soudan, protestants et catholiques, se trouvent dans une situation particulièrement périlleuse. Ils seraient moins de deux millions, soit 3 % de la population du pays,  musulmane à 97 %. Les organisations qui évaluent l’indice de liberté religieuse du pays dénoncent toutes une aggravation dramatique de la situation des minorités. Portes Ouvertes, l’Aide à l’Église en Détresse et le Département d’État américain s’accordent à dire que le Soudan est devenu l’un des pires pays au monde pour un chrétien. Depuis l'assaut contre El-Facher, les chrétiens sont « traqués et exécutés », explique l'ONG International Christian Concern. « Ils sont arrivés dans notre village en criant après les chrétiens, nous traitant d’"infidèles". Ils ont incendié l’église et les flammes se sont propagées, dévorant tout sur leur passage. Ils ont arraché les hommes à leurs maisons, les massacrant et les abattant. J’entendais leurs cris, mais il n’y avait pas le temps de réfléchir. Nous avons dû fuir. Nous avons tout abandonné », rapporte un survivant cité par cette ONG.

Cette situation s’explique en grande partie par la mentalité de la société musulmane soudanaise.  Les chrétiens sont considérés au mieux comme des étrangers. Le témoignage d’Essam Juma Abdelkreem illustre à quel point les a priori antichrétiens sont bien ancrés dans la société. Soudanais de Khartoum et chrétien converti de l’islam, il avait caché sa nouvelle religion quand il avait été embauché par son oncle, qui tient un magasin à Kampala, en Ouganda. Loin de son pays, il espérait échapper à la répression dont sont victimes les chrétiens convertis dans son pays, mais il savait le sujet suffisamment sensible pour vivre sa foi clandestinement, sans rien révéler à sa famille. Ce jeune homme de 27 ans travaillait bien, gagnait suffisamment sa vie, mais l’épouse de son oncle le surveillait. Elle avait noté qu’il ne récitait plus les cinq prières quotidiennes, ne lisait plus le Coran et ne fréquentait plus la mosquée. Fouillant dans son sac, elle y découvrit une Bible et fit part de ses découvertes à son époux. « Sous le choc, il m’a ordonné de quitter son magasin et sa maison immédiatement », rapporte Abdelkreem.

(Sources :  Persecutions.org 20/10/2025 ; Boulevard Voltaire, 08/11/2025 ; Morningstar 30/11/2025 )