Patrimoine 

Saint-Martin-du-Canigou, un lieu hors du temps

Cette année, nous fêtons les 80 ans de l’installation de la première croix au sommet du pic du Canigou. Située à 5 kilomètres à vol d’oiseau, l’abbaye Saint-Martin-du-Canigou est remarquable. Ce monastère, perché à 1 100 m d’altitude, est entouré de paysages à couper le souffle qui disent toute la grandeur de Dieu.

Vue du monastère Saint-Martin-du-Canigou / © Fabrice-Marie Gagnant

Fondés il y a plus de mille ans, les bâtiments du site ont été confiés en 1988 à la communauté des Béatitudes qui a encore aujourd’hui la mission d’assurer l’accueil spirituel et touristique des quelque 26 000 visiteurs annuels.

Majestueuse dans son écrin de verdure, l’abbaye Saint-Martin-du-Canigou ne se laisse découvrir qu’après 45 minutes de marche depuis le village de Casteil (Pyrénées-Orientales). Cette ancienne abbaye bénédictine, qui possède – de façon très exceptionnelle - deux églises superposées pour épouser le site, se situe à proximité de Villefranche-de-Conflent, célèbre cité catalane fortifiée par Vauban. L’accès se fait essentiellement à pied, sur un dénivelé de 250 mètres. On peine à croire qu’un site aussi étonnant et grandiose se cache au bout du périple.

AU CHEVET D’UNE VIEILLE DAME

L’abbaye a été confiée en 1988 à la communauté des Béatitudes qui anime l’accueil spirituel et touristique des pèlerins à travers des offices et des visites guidées. Au total, ce sont neuf femmes et trois hommes consacrés (dont deux prêtres) ainsi que trois fidèles laïcs (un couple et un célibataire) qui font vivre les lieux.

Pascale de Sagazan a rejoint avec son mari l’abbaye Saint-Martin-du-Canigou il y a bientôt 27 ans et vit dans une maison appartenant à la communauté, mais située en contrebas, dans le village de Casteil. Avec son mari, cette mère de six enfants est la directrice de l’activité touristique du lieu : « C’est parce que ce lieu est isolé qu’il peut apporter quelque chose aux personnes qui viennent chercher ici un peu de paix. » Si les visites guidées et les ventes du magasin sont les principales ressources du lieu, la communauté sollicite également les dons pour financer les travaux dans l’abbaye. « Je la compare volontiers à une vieille dame qui a toujours besoin qu’on soit à son chevet. » Alors qu’il n’y a pas d’hôtellerie, il est cependant possible de vivre quelques jours de ressourcement spirituel au milieu de la communauté qui ouvre ses portes à tous. « Il n’y a pas besoin de montrer sa carte de croyant », conclut-elle, insistant sur le bonheur pour la communauté d’accueillir lors des offices et des visites des touristes isolés ou des familles avec enfants.

Le père Paul, lui, vit à l’abbaye depuis 30 ans et explique avoir suivi la volonté du Seigneur. Il a tout vendu, son entreprise et ses biens, pour s’installer dans cet endroit paisible dans lequel il vit essentiellement de prière : « La beauté de cette abbaye m’a vraiment touché », avait-il confié dans un reportage sur France 3.

RENAÎTRE DE SES CENDRES

Édifiée sur un piton rocheux, l’abbaye Saint-Martin-du-Canigou a été fondée en 1009 par celui que l’on considère comme le fondateur de la Catalogne : Guifred le Velu. Trop peu nombreux et ayant à peine de quoi vivre, les derniers moines bénédictins très âgés quittent les lieux en 1783. Confisquée pendant la Révolution puis rachetée par un propriétaire de la région, l’abbaye va ressusciter grâce à Jules de Carsalade du Pont, évêque de Perpignan de 1900 à 1932. Grâce à de généreux donateurs, il parvient à réunir les sommes pour racheter le monastère.

Le site connaît alors deux importantes phases de restauration au XXe siècle. La première phase, de 1902 à 1932, est opérée par l’évêque lui-même pour reconstruire le monastère dont il ne restait que le clocher, l’église (dont une partie de la voûte s’était effondrée) et trois galeries du cloître inférieur. La seconde phase des travaux, de 1952 à 1982, est lancée par un moine bénédictin de l’abbaye d’En Calcat (Tarn) désireux de poursuivre l’oeuvre de restauration. À la fin des années 1980, pour que l’abbaye ne retombe pas en désuétude, le diocèse de Perpignan confie Saint-Martin-du-Canigou à la communauté des Béatitudes, l’abbaye étant trop petite et ne possédant plus suffisamment de terres cultivables pour permettre à une communauté cloîtrée comme les Bénédictins de vivre de leur travail. C’est ainsi que ce lieu saisissant… n’attend plus que vous !

Hugues-Olivier Dumez

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