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Sainte Joséphine Bakhita, de la souffrance à l'amour

L'histoire bouleversante de cette esclave africaine devenue sainte éclaire le monde par l’exemple de sa résilience et de sa foi inébranlable.

© Magazine 1000 raisons de croire

Joséphine Bakhita est née vers 1869 dans le Darfour, au Soudan. Dès sa prime enfance, voyant le soleil, la lune, les étoiles et la beauté de la nature, elle désire ardemment connaître le Créateur de ces belles choses pour lui rendre hommage. Ainsi, la petite fille cherche Dieu avant même de le connaître. Vers l’âge de 7 ans, elle est kidnappée puis vendue plusieurs fois comme esclave à des maîtres qui la maltraitent et la martyrisent. Ses ravisseurs lui don-nent le nom de Bakhita, qui signifie « la chanceuse ».

Esclave, elle ne passe pas un seul jour sans plaies. Pas encore guérie des coups reçus, elle en subit d’autres sans savoir pourquoi. Pourtant, elle ne se rebelle et ne désespère jamais, protégée, dira-t-elle, par ce Dieu qu’elle ne connaît pas encore. Elle subit notamment l’épreuve du tatouage au cours de laquelle on lui trace au couteau 114 longues entailles sur la poitrine, le ventre et le bras droit, que l’on frotte ensuite avec du sel pour que les cicatrices soient profondes et pour éviter le risque de septicémie.

 

UNE RENCONTRE PROVIDENTIELLE

Vers l’âge de 13 ans, elle est achetée par Calisto Legnani, consul italien à Khartoum, un homme bon qui, trois ans après, suite à un soulèvement dans le pays, l’amène avec lui en Italie, où il la confie à la famille Michieli qui habite dans la région de Venise. Là, elle devient la nourrice de leur petite fille qui vient de naître. C’est leur intendant, Illuminato Cecchini, un chrétien bon et vrai qui, en lui offrant un jour un crucifix, lui fait découvrir Jésus qu’elle appellera dorénavant son « Bon Patron ». C’est lui qu’elle cherchait depuis toutes ces années et qui la protégeait, avant même qu’elle ne le connaisse.

Elle est baptisée le 9 janvier 1890 chez les Filles de la Charité canossiennes à Venise et prend le prénom de Joséphine. En 1896, après un laborieux chemin, elle devient Fille de la Charité canossienne. Des années plus tard, lorsqu’on lui demande comment elle réagirait si elle rencontrait les gens qui l’ont kidnappée, vendue et martyrisée, elle répond qu’elle se mettrait à genoux pour leur embrasser les mains car, sans eux, elle ne serait pas devenue chrétienne et religieuse. Elle ajoute que les négriers étaient les maîtres et elle leur esclave, qu’ils n’agissaient pas par méchanceté mais par habitude, et qu’elle priait pour qu’eux aussi découvrent Dieu, afin de les retrouver au paradis.

Joséphine passe le reste de sa vie à se prodiguer humblement et avec amour pour les autres au couvent de Schio (près de Vicence) où elle est cuisinière durant une vingtaine d’années. Elle y meurt le 8 février 1947. Voici quelques-unes des très nombreuses prières jaculatoires à son « Bon Patron » qui ont rythmé ses journées : « Tout comme veut le Patron ! – Il est tellement bon ! – Ainsi veut le Seigneur ! – Je fais tout ce que je peux : le reste, il le fait lui ! – Le Seigneur s’en chargera, c’est lui le Patron, moi, sa pauvre créature ! – Tout passe, faisons tout pour le Seigneur ! », etc. C’est par sa très grande humilité que la Madre moretta (la « petite Mère noire ») touche particulièrement tous ceux qui l’ont connue, jusqu’à susciter un nombre conséquent de vocations religieuses et sacerdotales.

 

UN MODÈLE D’ESPÉRANCE

Béatifiée le 17 mai 1992 puis canonisée le 1er octobre 2000 par Jean-Paul II, Joséphine Bakhita est fêtée le 8 février, une date choisie ensuite par le pape François pour être la Journée mondiale de prière et de réflexion contre la traite humaine. De nos jours, des millions de personnes dans le monde sont privées de liberté et contraintes à vivre pratiquement en esclavage. Pensons aux victimes – souvent des femmes et des enfants – de la servitude, du travail forcé, de l’exploitation et de l’esclavage sexuel, de la mendicité forcée, du prélèvement d’organes et du trafic du corps humain. Pour ces hommes et ces femmes, sainte Joséphine Bakhita est un modèle d’espérance dont l’Église catholique encourage les fidèles à suivre les pas.

Joséphine Bakhita, ancienne esclave, peut être considérée comme étant la femme libre par excellence : son amour, sa confiance, son abandon à son « Bon Patron » a été total et sans limites. Aussi Jésus a-t-il pu opérer en son âme pour nous donner une telle sainte. Relisons ce que le pape Jean- Paul II a dit lors de sa béatification : « En Joséphine Bakhita, on trouve un témoin éminent de l’amour paternel de Dieu et un signe lumineux de la pérenne actualité des Béatitudes… Son message est un message de bonté héroïque, à l’image de la bonté du Père céleste. Elle nous a laissé un témoignage de réconciliation et de pardon évangélique, qui a aujourd’hui une signification énorme : à notre époque où la course effrénée au pouvoir, à l’argent, à la jouissance cause tant de méfiance, de violence et de solitude, soeur Bakhita nous est redonnée par le Seigneur comme soeur universelle, parce qu’elle nous révèle le secret du bonheur le plus vrai : les Béatitudes. »

Au début de son encyclique sur l’espérance intitulée Spe salvi (Sauvés dans l’espérance), Benoît XVI a donné Joséphine Bakhita comme exemple : « Pour nous qui vivons depuis toujours avec le concept chrétien de Dieu et qui nous y sommes habitués, la possession de l’espérance, qui provient de la rencontre réelle avec ce Dieu, n’est presque plus perceptible. L’exemple d’une sainte de notre temps comme Bakhita peut en quelque manière nous aider à comprendre ce que signifie rencontrer ce Dieu, pour la première fois et réellement. »

 

UNE VIRGINITÉ PROTÉGÉE PAR LA MADONE

Ce qui est absolument extraordinaire aussi, c’est que Bakhita, jeune, belle et esclave pendant de nombreuses années de plusieurs maîtres, soit restée vierge ! Elle dira en effet avoir vécu dans la fange, mais avoir toujours été préservée car la Madone, par la grâce de Dieu, l’avait protégée alors même qu’elle ne la connaissait pas encore.

Joséphine Bakhita, de son vivant déjà, fut l’intercesseur de nombreuses grâces obtenues de son « Bon Patron » mais, comme elle l’avait prédit, elle en obtient probablement beaucoup plus aujourd’hui, maintenant qu’elle est auprès de lui : « Au Ciel, j’irai chez Jésus et j’obtiendrai de lui des bénédictions particulières. Au paradis, je serai puissante et j’obtiendrai pour tous beaucoup de grâces. »

Aujourd’hui, des écoles, des maisons d’accueil, des instituts et des églises s’ouvrent dans le monde entier sous le nom de Joséphine Bakhita. En France, citons les paroisses Sainte-Joséphine-Bakhita de Langeais, de Montrouge, d’Angoulême, le groupement paroissial Sainte-Joséphine-Bakhita de Ferney-Voltaire, etc. Le nom de Bakhita a aussi été donné à une cloche du campanile au Val-Fourré, sans oublier la Maison Bakhita à Paris, dont la vocation est d’accueillir et aider les migrants et toutes personnes en difficulté.

 

L’UNE DES PLUS GRANDES SAINTES DU XXIe SIÈCLE

Bakhita est en passe de devenir l’une des saintes majeures du XXIe siècle. L’Année Sainte qui s’est ouverte et dont le thème est « Pèlerins de l’espérance » devrait entériner cette vérité. En effet, comme l’écrit Benoît XVI dans Spe salvi, Bakhita est un témoin éminent de cette espérance : pas de la petite espérance, mais de la grande espérance, celle de se savoir aimés de Dieu, et quoi qu’il nous arrive, d’être attendus dans son amour. Par la miséricorde de son « Bon Patron », nous sommes tous appelés à nous sentir, comme elle, vraiment enfants de Dieu, imprégnés de cette parole de saint Jean : « La vérité vous rendra libres » (Jn 8,32).

 

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Gino Testa, auteur de cet article, est très proche des canossiennes du couvent Sainte-Joséphine-Bakhita de Schio (Italie). Il est l’auteur de la neuvaine à Joséphine Bakhita éditée par l’Association Marie de Nazareth et disponible ici : editions.mariedenazareth.com/39-neuvaines.

Gino Testa

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