Actualité en bref 

Reconstruire malgré tout en Syrie

Jacques Mourad lors de son ordination épiscopale en 2023 / © Cécile Massie.

Mgr Jacques Mourad, archevêque syriaque catholique de Homs, a confié ses espérances pour l’avenir de son pays dans un entretien accordé à l’Aide à l’Église en Détresse, le 3 juin. Malgré les incertitudes qui pèsent sur la Syrie, il affirme sa « confiance totale » pour l’avenir. Emprisonné pendant la guerre civile en 2015, il assure que cette expérience éprouvante l’a libéré du doute : « Pour quelqu’un comme moi, qui a expérimenté la liberté intérieure grâce à ma captivité, rien ne peut plus m'emprisonner. Rien ne me place dans un état de vulnérabilité. Je contemple ma vie, et je vois qu’elle est entre les mains de Dieu, dont je suis sûr qu’Il me guide. » Il étend cette confiance à l’ensemble de son pays et de sa communauté chrétienne, terriblement éprouvée par la guerre civile.

Pourtant, les Syriens et singulièrement les chrétiens auraient de bonnes raisons de se montrer inquiets, voire de désespérer après 14 années de guerre civile, qui n’ont abouti qu’à une situation bancale. Le nouveau gouvernement, issu des factions djihadistes, affiche une façade ouverte et démocratique, mais la réalité est tout autre sur le terrain. Des groupes armés à la structure hiérarchique floue patrouillent dans les rues et prétendent imposer un islam rigoriste et exclusif. Il ne correspond pas aux traditions locales, car la Syrie représentait historiquement un carrefour pour les populations et une mosaïque de communautés religieuses y cohabitaient. Selon le prélat, les Syriens sunnites eux-mêmes se montrent mal à l’aise devant les exigences de ces miliciens. Mais ils n’osent pas l’exprimer ouvertement : « La peur règne parmi eux car, pour les salafistes, les sunnites qui ne sont pas sur la même ligne qu’eux, sont considérés comme des blasphémateurs et le blasphème est puni de mort. »

Pour le moment, selon l’archevêque, les chrétiens ne font pas l’objet de persécutions particulières. Mais le désordre ambiant et les différences de traitements entre les régions laissent un sentiment de malaise. À titre d’exemple, les jeunes du diocèse de Homs ne partiront pas en vacances d’été sur la côte, car les autorités locales se montrent plus rigoristes qu’ailleurs et refusent le principe des camps mixtes. En revanche, les chrétiens de Homs ont pu sans problème participer aux processions traditionnelles en l'honneur de la Vierge Marie, au mois de mai.

Plus globalement, la population syrienne souffre de la pauvreté et cela continue à alimenter l’exode de ses forces vives. « Chaque jour, des personnes viennent me demander de l’argent pour acheter du pain », déplore Mgr Mourad. Il constate que la majorité des gens ne peuvent plus se chauffer et que toute la population attend désespérément la levée totale des sanctions économiques et le retour de la croissance.

L’Église locale, soutenue par des associations de charité internationale, s’engage résolument pour la reconstruction du pays. Un chantier gigantesque s’ouvre à elle, dont Mgr Mourad énumère les premiers éléments : « Aider les jeunes chrétiens qui veulent se marier, soutenir et encourager les familles, soutenir les hôpitaux et les écoles pour les communautés chrétiennes. » Il espère qu’à terme, le retour de l’activité économique encouragera les exilés à revenir. Ils seraient plus de 8 millions, sur une population d’environ 20 millions d’habitants, à avoir fui le pays.

(Sources : Aide à l’Église en Détresse 5/6/2025)

Retour à l'accueil