Sauvage assassinat d’un artisan de paix en Birmanie

© CC0, pxhere

Le père Donald Martin Ye Naing Win a été assassiné le 14 février, dans l’une des zones administrées par les rebelles, au nord-ouest de la Birmanie. Prêtre de la paroisse Notre-Dame de Lourdes de l'archidiocèse de Mandalay, il a été retrouvé mort, lardé de coups portés avec des armes blanches.

Alors qu’une guerre civile terrible ravage le pays depuis le coup d’État de la junte, en 2021, les victimes se multiplient et l’opposition se radicalise. Il n’est désormais plus question pour elle de négocier avec la junte, mais de l’abattre. Mgr Marco Tin Win, archevêque de Mandalay, a appelé les fidèles à ne pas céder à la spirale de violences qui s’empare du pays, dans son homélie lors de l’enterrement du prêtre : « Que le sang et les sacrifices d’innombrables personnes innocentes, ainsi que ceux du Père Donald Martin Ye Naing Win, serve d’offrande pour mettre fin à la violence qui sévit dans toute la nation. Tirons les leçons de ces expériences déchirantes que nous avons vécues. » Plus de 5 000 personnes étaient rassemblées pour les obsèques qui ont eu lieu dans l'église catholique de l'Assomption de Marie, dans le village natal du père Donald Martin, à Pyin Oo Lwin. Le jeune prêtre s’investissait dans l'éducation des enfants et des jeunes de sa paroisse, et ce en dépit des fermetures d'écoles à cause du conflit.

Cet engagement lui a probablement coûté la vie, si l’on en croit les informations qui parviennent du terrain, transmise par un prêtre birman anonyme. Les Forces de défense populaire (PDF) qui administrent les lieux ont arrêté et remis aux autorités une dizaine d’hommes qui appartiendraient à une milice autonome rebelle. Le prêtre ne serait donc pas tombé sous les balles de la junte mais victime d’un groupe antigouvernemental.

À 18h, ce 14 février, une dizaine d’hommes armés, dont l’un avec une épée, s’en sont pris au père Martin alors qu’il s’apprêtait à bénir un sanctuaire, dans l’optique du centième anniversaire de sa paroisse. Ils lui ont demandé de s’agenouiller, ce à quoi il a répondu : « Je m’agenouille devant Dieu seul. Avez-vous un problème avec nous ? Quelque chose dont vous voulez discuter ? » Ils ont répondu qu’ils n’avaient rien à discuter et celui qui tenait l’épée l’a immédiatement transpercé par derrière. Il l’a ensuite frappé au cou, le prêtre s’est protégé avec sa main qui a été coupée. Ils ont ensuite sorti le prêtre mourant du sanctuaire.

Selon les témoins, ces hommes étaient déjà venus une fois, en pleine nuit et le prêtre leur avait demandé de venir de jour. Cet élément laisse supposer qu’il s’agit d’un crime prémédité. Quant à son mobile, il provient probablement d’un désaccord entre le prêtre et l’un de ses voisins, un moine bouddhiste engagé dans la résistance. Le moine employait des jeunes gens dans un programme d’entraînement militaire. Certains n’avaient pas plus de 12 ans et le prêtre s’opposait fermement à ce recrutement d’enfants soldats. Il avait révélé la nature des enseignements du moine aux parents des enfants embrigadés et les avait convaincus de retirer leurs enfants.

La guerre civile birmane voit progressivement les armées opposées à la junte se coaliser entre-elles, mais avec beaucoup de lenteur et de difficultés. L’absence d’un commandement commun et d’une administration unifiée fait craindre que des groupes armés hors de contrôle sèment la dévastation dans le pays. Le courroux légitime contre la junte pourrait se transformer en violence aveugle et multiplier les drames tel que celui qui a frappé le père Martin, redoute notre contact en Birmanie.

(Aleteia 17/2/2025 et sources personnelles)

Retour à l'accueil