Une petite Église au Sahara
Alors que les pays du Sahel occidental – Mali, Burkina Faso, Niger, Nigeria – subissent la violence islamique, la Mauritanie échappe largement à cette situation. Le pays abrite une petite Église catholique qui bénéficie d’une bonne image auprès de la population très majoritairement musulmane du pays.
« Lorsqu’en 1975 la région a cessé d’être un protectorat espagnol, l’Église a décidé de rester, alors que la majorité de la population non autochtone avait quitté la région. Cette persévérance n’est pas passée inaperçue auprès du reste de la population », assure Mario León Dorado, préfet apostolique et missionnaire des Oblats de Marie Immaculée. Il constate que la population sahraouie considère la petite Église catholique locale comme partie intégrante de son identité. Le prêtre illustre cette attitude d’une anecdote. Quand un programme de restructuration urbaine menaçait l’une des églises du pays, la détermination d’un sahraoui musulman a sauvé l’édifice. L’homme, en fauteuil roulant, s’est interposé devant les bulldozers envoyés par le gouvernement. Le projet de destruction a été abandonné et le lieu de culte fait désormais partie du patrimoine local.
Située en plein sur la route de l’Atlantique, qui mène les migrants africains jusqu’en Europe, l’Église locale joue un rôle décisif dans l’accueil de ces populations. Les migrants ont souvent été trompés par des passeurs qui leur faisaient miroiter un avenir radieux. A ces personnes désabusées, souvent révoltées, le missionnaire oblat donne des informations qui les aident à prendre les meilleures décisions possibles. « En même temps, il est important que ceux qui décident de retourner dans leur pays d’origine ne subissent pas de discrimination ou de stigmatisation pour ne pas avoir répondu aux attentes imposées », souligne-t-il.
Parmi les migrants, les femmes vivent les situations les plus dures encore. Elles n’ont souvent aucune autre option que la prostitution pour survivre et beaucoup se retrouvent enceintes et sans ressources. Le prêtre se souvient en particulier de l’histoire déchirante d’une ivoirienne qui avait échoué dans sa paroisse avec « trois dettes et un bébé ». Elle a échappé au suicide grâce à l’aide de la communauté.
« L’action de l’Église ici se concentre sur les petits gestes qui font la différence. Comme celui de parler aux mères pour qu’elles fassent enregistrer leurs enfants à la naissance. Un enfant non enregistré est un enfant invisible, sans accès aux vaccins, à l’éducation et encore plus vulnérable si sa famille décide d’émigrer », explique encore le prêtre. Il décrit une vie de paroisse qui, malgré le petit nombre de pratiquants, rayonne et apporte une espérance qui n’est pas de ce monde. Il conclut : « La foi ne change pas la situation, mais elle aide les migrants à en supporter le poids. »
(Source : Aide à l’Église en Détresse, octobre 2024)
Retour à l'accueil