Passe d’armes entre le Pape et Donald Trump au sujet des migrants

Frontière entre Tijuana et San Diego / © Tomas Castelazo, www.tomascastelazo.com, Wikimedia Commons.

Le torchon brûle entre le pape François et le président des États-Unis. Dans une lettre aux évêques américains publiée le 11 février, le chef de l’Église catholique se dresse contre la politique migratoire mise en œuvre, avec des expulsions massives, par Donald Trump.

Dans cette lettre aux évêques des États-Unis, le Pape, sans nommer le président américain, assure suivre « de près la grande crise qui se déroule aux États-Unis avec le lancement d’un programme de déportations massives (sic) » et dénonce une idéologie qui « impose la volonté des plus forts comme critère de vérité ». Il estime qu’une conscience « bien formée » ne peut qu’« exprimer son désaccord avec toute mesure qui identifie tacitement ou explicitement le statut illégal de certains migrants à la criminalité ». Il réaffirme, comme l’avait développé avant lui le pape Benoît XVI, le droit d'un pays à se défendre » contre les migrants qui auraient commis des « crimes graves », mais pour le démarquer de « l’acte de déporter des personnes qui […] ont quitté leur pays pour des raisons de pauvreté extrême, d’insécurité, d’exploitation, de persécution ou de dégradation grave de l’environnement ». Pour le Saint-Père, la « dignité infinie et transcendante » de chaque personne humaine « sans exception » doit dépasser « tout autre considération juridique ». Il ajoute cette prédiction : « Ce qui est construit sur la base de la force, et non sur la vérité de la dignité égale de chaque être humain, commence mal et finira mal. » Le souverain pontife exhorte enfin les évêques des États-Unis à continuer à défendre « ceux qui sont considérés comme moins précieux, moins importants ou moins humains » et engage les fidèles « à ne pas céder aux récits qui discriminent et causent des souffrances inutiles. »

Dans un communiqué publié le 22 janvier, le président de la conférence épiscopale des États-Unis (USCCB), Mgr Timothy Broglio, avait jugé « profondément troublants » certains décrets de Donald Trump portant sur « le traitement des immigrés et réfugiés, l’aide au développement, l’extension de la peine de mort ou encore l’environnement ». Cependant, il avait aussi relevé que d’autres décrets pouvaient être vus « sous une lumière plus positive », comme la reconnaissance par l’État fédéral de l’existence de seulement deux genres. L’épiscopat américain marche sur des œufs. Les « messalisants » (fidèles participant à la messe chaque semaine) ont largement contribué à faire élire le candidat républicain (64 % pour Trump contre 33 % pour la démocrate Kamala Harris, selon un sondage de Public Religion Research Institute).

La réplique de la Maison-Blanche à la lettre du pape François ne s’est pas fait attendre : « Je voudrais qu’il [le Pape] se concentre sur l’Église catholique et nous laisse nous occuper des frontières. Il veut nous attaquer parce que nous assurons la sécurité de nos frontières ? Il a un mur autour du Vatican, n’est-ce pas ? [...] Nous ne pouvons pas avoir un mur autour des États-Unis », a déclaré le 11 février, en réponse à des journalistes, le catholique Tom Homan, ex-directeur de l'agence du contrôle des frontières américaines, en charge de l'Immigration dans la nouvelle administration Trump. Notons à ce propos que l’État de la Cité du Vatican a fortement aggravé les sanctions encourues par ceux qui entreraient illégalement sur son territoire :  un décret daté et entré en vigueur le 19 décembre 2024, vise « quiconque entre sur le territoire de l’État de la Cité du Vatican par violence, menace ou tromperie » (en se soustrayant aux systèmes de sécurité). Les contrevenants sont désormais passibles d’une peine pouvant aller de un à quatre ans d’emprisonnement, et d’une amende de 10 000 à 25 000 euros.

(Sources : La Croix 11/02/2025  et 12/02/2025 ; Cnews, 11/02/2025 ; Cath-Info, 14.01.2025)

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