L’Église anglicane décapitée par des scandales sexuels
Les deux archevêques qui viennent de se succéder à la tête de l’Église d’Angleterre ont dû démissionner après des révélations d’abus sexuels qu’ils n’auraient pas dénoncés. La hiérarchie ecclésiastique anglicane a d’abord été mise en cause en la personne du primat de la Communion anglicane, c’est-à-dire son chef spirituel et plus haut dignitaire, l’archevêque de Canterbury, Justin Welby. Un rapport l’accuse d’avoir couvert les agressions physiques et sexuelles commises entre les années 1970 et 2010 sur au moins 115 garçons et jeunes hommes, dans le cadre de camps de vacances chrétiens. Justin Welby est accusé de ne pas avoir signalé ces faits aux autorités en 2013, alors même qu’il en prenait connaissance. Le prédateur, John Smyth (décédé en 2018) était un avocat anglican. Selon le rapport, ce laïc engagé serait « probablement le plus prolifique des agresseurs en série associés à l’Église d’Angleterre ». Le 12 novembre, la publication de ce rapport a entraîné la démission de Justin Welby. « J’espère que cette décision montre clairement à quel point l’Église d’Angleterre comprend la nécessité d’un changement, et notre engagement profond à créer une Église plus sûre », a écrit l’archevêque dans un communiqué. 390 personnes liées à l’Église d’Angleterre ont été condamnées pour des infractions sexuelles commises au cours des années 1940-2018.
Un mois après la démission de l’archevêque de Canterbury, Stephen Cottrell, archevêque de York, qui venait de prendre provisoirement la tête de l’Église anglicane, est à son tour accusé d’avoir maintenu en poste un prêtre suspecté d’abus sexuels. L’archevêque a démissionné le 16 décembre après la diffusion d’une enquête de la BBC. Les faits remontent à 2010. A l’époque, Stephen Cottrell était l’évêque de Chelmsford, au sud-est de l’Angleterre. Le prêtre qu’il avait maintenu à son poste, David Tudor, faisait l’objet de plusieurs accusations d’agressions sexuelles. Le même David Tudor a été interdit de ministère il y a deux mois, après avoir reconnu des relations sexuelles avec deux jeunes filles, dont l’une âgée de 15 ans. Au total, sept femmes affirment avoir été sexuellement agressées par le prêtre lorsqu’elles étaient enfants. L’une d’entre elles aurait reçu une indemnisation « à six chiffres » de la part de l’Église en 2019, d’autres ont déposé plainte au civil. Prêcheur charismatique, David Tudor a officié pour l’Église d’Angleterre pendant plus de quarante-six ans, à Londres et dans l’est du pays. Parmi ceux qui reprochent son inaction à Stephen Cottrell, une femme, Helen-Ann Hartley, évêque de Newcastle (les femmes peuvent depuis 1992 être ordonnées prêtres dans l’Église d’Angleterre). « Le fait de ne pas avoir agi dans cette affaire sape complètement (la) crédibilité » de l’archevêque d’York, a-t-elle déclaré à la BBC.
L’Église anglicane est donc à la recherche d’un nouvel archevêque de Canterbury. Outre les scandales d’abus sexuels, elle est confrontée à une hémorragie de fidèles au Royaume Uni, à de profondes divisions sur les questions idéologiques de genre et de sexualité et à la nécessité de trouver un équilibre entre ses racines britanniques de plus en plus desséchées et sa présence croissante dans les pays du Sud, la majorité des 98 millions de membres de la Communion anglicane se trouvant aujourd’hui en Afrique et en Asie.
Selon l’agence Zenit, parmi les candidats pressentis pour être archevêque de Canterbury figure une femme née en Iran et ayant fui au Royaume-Uni alors qu’elle était adolescente, Guli Francis-Dehqani, actuellement évêque de Chelmsford. La décision revient à la Commission des Nominations de la Couronne (CNC), chargée de nommer deux candidats pour le poste, le choix final revenant au Premier ministre Keir Starmer (athée déclaré) et au roi Charles III, gouverneur suprême de l'Église d'Angleterre, en tant que souverain du Royaume-Uni.
(Sources : Le Figaro, La Croix 12/11/2024 ; Zenit 28/11/2024)
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